Et si on arrêtait de se tromper sur l'erreur_RH info_Séverine Loureiro

Et si on arrêtait de se tromper sur l’erreur ?

Séverine LoureiroArticles, Droit à l'erreur Leave a Comment



Article pour RH info diffusé le 11 mai 2022 ici

Tout le monde s’accorde sur le fait que « l’erreur est humaine », que « ça arrive à tout le monde », que « c’est en chutant que l’on apprend à marcher », et j’en passe. Tout le monde est d’accord, tout le monde l’a expérimenté, tout le monde partout… sauf : en entreprise !

En entreprise, l’erreur semble être une sorte d’exception, qui n’arrive que rarement et quand elle arrive elle est le fait d’une incompétence ou d’un étourdi, elle est alors cachée et on n’en parle pas.

C’est de ce constat qu’est née mon envie d’écrire un livre sur le sujet du droit à l’erreur. Un constat qui repose sur de nombreuses idées fausses concernant l’erreur, des idées fausses aux sources très variées, notamment culturelles et ancrées depuis l’école où l’erreur est barrée au stylo rouge et entraîne une perte de points.

Je pense aussi que le droit à l’erreur a mauvaise presse en entreprise par confusion sur ce qu’est une erreur. C’est pourquoi pour que l’entreprise entende et prenne conscience des apports d’un droit à l’erreur encadré, il faut éclairer et distinguer la différence entre une erreur et une faute, mais aussi entre une erreur et un échec.

Erreur vs Faute

Une erreur est un écart involontaire avec un cadre de référence qui peut être une règle, une procédure, une norme. On est là dans l’exécution d’une action, le « Comment ».

Or on le sait, rares sont les entreprises où tout est formalisé, où tout fait l’objet d’une procédure claire et connue de tous. Par ailleurs, dans les entreprises où chaque action est cadrée on trouve souvent à redire sur le manque d’autonomie et la « robotisation » que cela entraîne pour le collaborateur. Dès lors qu’il n’existe pas un cadre pour toutes les actions de travail, il est donc techniquement très difficile de qualifier une erreur puisqu’il manque une référence avec laquelle constater l’écart…

Le caractère « involontaire » de la définition de l’erreur est lui aussi fondamental et représente la principale différence avec la faute qui est une transgression volontaire d’une règle.

Les entreprises qui travaillent sur le droit à l’erreur commencent par bien distinguer ses deux notions, et notamment auprès de leurs collaborateurs. L’armée de l’air a de son côté inscrit l’erreur involontaire et non répétitive dans une charte de « dépénalisation » qui protège d’une sanction celui à l’origine d’une erreur, contrairement au traitement de la faute qui elle est sanctionnable.

 

Mais l’erreur ne doit pas être abordée comme une fatalité, ni acceptée comme une finalité. Le doit à l’erreur n’est pas un blanc-seing signé aux collaborateurs les autorisant à faire des erreurs, c’est avant tout une obligation d’apprentissage pour l’entreprise, en l’encadrant elle permet au collectif de progresser. Dans le livre, j’ai souhaité faire témoigner des entreprises de leurs bonnes pratiques pour encadrer le droit à l’erreur et en tirer parti.

 

Erreur vs Echec

On confond également très souvent erreur et échec, d’ailleurs on parle beaucoup plus facilement d’échec notamment dans le milieu entrepreneurial : si t’es fondateur d’une startup mais que tu n’as pas une histoire d’échec précédent à raconter, t’as raté ton storytelling !

Le fait est qu’il est devenu de bon ton de parler de ses échecs, les recruteurs se sont d’ailleurs réappropriés la question que l’on entend de plus en plus en entretien.

En revanche, la boulette, le « oups le mail est parti à la mauvaise liste de diffusion », l’explosion d’un budget pour mauvaise estimation, bref l’erreur pas glorieuse mais qui arrive chaque jour en entreprise, cette erreur-là ne fait vraiment l’objet de storytelling.

L’échec aussi est un écart involontaire, mais par rapport à un résultat attendu, à un objectif. Au passage, je me demande toujours comment un manager arrive à estimer un échec alors qu’il n’y avait pas d’objectif, mystérieux vous en conviendrez.

Le fait est, que cette confusion entre échec et erreur est à l’origine d’un fantasme que j’ai souvent entendu : seuls les mauvais collaborateurs font des erreurs.

Quand on sait que l’erreur est le corollaire inévitable de l’innovation, et donc de la performance, on peut légitimement se demander si le mauvais collaborateur n’est pas celui qui ne fait jamais d’erreur puisqu’il est aussi celui qui ne teste jamais rien de neuf, et ne cherche pas à améliorer sa pratique. C’est une question, et au vu des nombreux apports du droit à l’erreur pour l’entreprise, pour le manager et pour le collaborateur que je développe dans le livre, c’est une question à laquelle on répond vite.

Livre « Le droit à l’erreur », Dunod, juin 2021

Droit a l erreur_Livre Séverine Loureiro

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