L’effet Wahou au bureau

L’effet Wahou au bureau, ou comment différencier l’Expérience Collaborateur sur site de celle en télétravail

Séverine LoureiroArticles, Expérience Collaborateur Leave a Comment



Article pour RH info diffusé le 26 septembre 2022 ici

Ces derniers mois on a beaucoup écrit sur le futur du bureau, sur les évolutions à venir des espaces de travail dans une organisation hybride, et sur les nouvelles attentes des salariés. On essaie de comprendre ce qu’il faudrait mettre en place pour donner envie aux collaborateurs de passer plus de temps en présentiel dans les murs de l’entreprise. Et bien ne cherchez plus, on a eu la réponse cet été. La clim !

Vous ne l’avez pas remarqué ? Lors de la première vague de chaleur intense début juillet, beaucoup de collaborateurs faisaient le choix d’aller au bureau pour être au frais. Euréka ! Non ? Vous ne voyez pas le rapport avec l’enjeu majeur de l’aménagement des espaces ? Et pourtant, il n’y a pas meilleur exemple que celui-ci pour illustrer ce qu’attendent les collaborateurs : un espace de travail qui leur apporte un plus par rapport à ce qu’ils ont chez eux.

 

Les collaborateurs ne viennent plus au bureau pour trouver une table où poser leur ordinateur et une connexion internet. Ça, ils l’ont chez eux.

Pour rappel, ceux qui n’avaient pas encore d’espace de travail à domicile ont été contraints et forcés de s’en aménager un pendant les confinements, certains ont même investi dans l’achat de matériel et/ou de travaux pour se faire un espace bureau. Aussi, quand 2 ans plus tard, leur entreprise leur demande de revenir en présentiel pour trouver la même chose mais dans un open space bruyant qu’ils auront mis 1 heure à rejoindre en transport, les collaborateurs hésitent. Refuser de le comprendre est de la mauvaise foi.

Alors on peut discourir des heures et des pages sur « la valeur travail scandaleusement perdue » (sic), mais le premier enjeu de l’aménagement des locaux est celui de la valeur ajoutée pour le salarié. De cette valeur ajoutée nait l’Expérience Collaborateur en général, et l’expérience de bureau en particulier. Ici aussi c’est l’angle du collaborateur qui doit présider aux réflexions sur les aménagements, et je propose de commencer par se poser cette question :

Que doit offrir l’espace de travail dans l’entreprise que le collaborateur n’a pas chez lui ?

Les échanges avec les collègues

Bien entendu on pense immédiatement à l’équipe, au collectif. C’est une évidence. L’autre évidence c’est la frustration que peuvent ressentir les collaborateurs à se retrouver seuls sur un plateau car leurs collègues sont en télétravail ce jour-là. Quand il s’agit de brandir le collectif comme argument massue pour faire revenir les collaborateurs au bureau y a du monde, quand il s’agit de leur donner les moyens de voir le planning des présences de l’équipe, là n’y a souvent plus grand monde. Il est certain qu’il est plus simple de faire revenir tous les collaborateurs tous les jours, mais ce n’est pas le sens de l’histoire, et l’Histoire n’a qu’un sens.

Il faut aussi s’interroger sur la façon dont l’aménagement et le management contribuent à la collaboration et aux échanges quand les collaborateurs sont sur site. Si tous les collaborateurs d’une équipe, présents sur site, ne font que se croiser dans la journée entre leurs réunions à distance avec d’autres participants, quid de l’intérêt d’être en présentiel en même temps ? Pour donner envie aux collaborateurs de venir souvent au bureau, il faut penser le temps présentiel comme un temps collectif, imaginer des rituels d’équipe qui favorisent les échanges, des locaux qui permettent aux collaborateurs de vivre une expérience ensemble.

Le retour du babyfoot, la revanche

Je profite de la tribune que me donne RH info pour faire une introspection : dès 2015, quand les corbeilles à fruits et les babyfoots battaient leur plein en entreprise et qu’on n’y voyait rien à redire, j’ai beaucoup écrit sur la poudre aux yeux de ce genre d’initiatives. Ce n’est plus une originalité de les critiquer aujourd’hui, le babyfoot est devenu un sujet de blagues chez les RH. Eh bien, après avoir contribué à ce mouvement, je crois que je vais repartir à contre-courant dans l’autre sens…
Non pas que j’ai l’esprit de contradiction, disons que j’ai plutôt l’esprit d’adaptation : le contexte a changé !

Je suis convaincue que pour faire du bureau un endroit attractif qui donne envie aux collaborateurs de s’y rendre, et un argument de marque employeur aussi pour les candidats, il faut en faire un endroit original et différenciant. Et le toboggan chez Google Zurich (entre autres), que j’ai moqué jadis, prend du sens aujourd’hui : c’est toujours un gadget pour en mettre plein les yeux oui, mais un gadget qui marque le lieu et apporte une brique « expérientielle » différente de ce que le collaborateur a chez lui quand il télétravaille.

Une terrasse aménagée pour que les équipes puissent y faire leurs réunions, un jardin qui permet aux collaborateurs de se connecter et y travailler quelques heures, une salle « cinéma » pour les pauses déjeuner, des salles de réflexion avec aquarium géant ou hamacs, des jeux pour que les collègues ne fassent pas que se croiser quand ils sont ensemble sur site : billard, ping-pong, babyfoot, … plus j’y pense, et plus je suis persuadée que ce sont ce genre d’éléments qui feront la différence.

Je sais que ça paraît décalé, je le sais parce que je l’ai longtemps pensé. Mais dans une optique de création de valeur pour le collaborateur, j’ai la conviction qu’il faut faire vivre aux salariés une expérience différente pour leur donner envie de venir au bureau avec plaisir. Les sièges des entreprises ont longtemps été pensés comme une vitrine pour l’externe, de plus en plus ils devront se rendre attractif pour l’interne.

Dans cette optique, selon moi la tendance d’aménagement des locaux « comme à la maison » qui était majoritaire depuis plusieurs années n’a plus vraiment de sens. On voulait que les collaborateurs se sentent « comme chez eux » au travail, mais ça ne fonctionne plus quand ils peuvent être au travail chez eux, littéralement. Leur proposer un environnement trop proche de ce qu’ils vivent en télétravail pourrait aujourd’hui avoir un effet inverse à celui rechercher : « si je suis au bureau comme chez moi, autant que je reste chez moi » !

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